CHABAT VAYEHI

22 DECEMBRE 2007 – 13 KISLEV 5768

Jérusalem Paris - Bruxelles New York
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Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser un Dvar Thora sur la paracha de la semaine.

Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde, via Internet.

Notre Institution a emménagé dans un nouveau bâtiment situé face au Mont HERZL où nous serons toujours heureux de vous accueillir ; ce bâtiment porte dorénavant le nom de BEIT YEHOUDA VEHANA au nom de la famille qui a contribué au financement de cette acquisition ; notre reconnaissance est infinie tant pour cette famille que pour tous nos généreux donateurs et amis.

Nous avons démarré depuis Roch Hodech Hechvan la nouvelle session d'études et y avons accueilli 44 nouveaux élèves sélectionnés parmi des centaines de candidats. Nous aurons donc 180 élèves internes à la Yéchiva et 210 personnes au Beth Hamidrach, avec les enseignants et étudiants externes. Nous grandissons grâce à votre aide : il y a neuf ans,nous étions9 !

Ce Dvar Thora est diffusé pour la guérison (refoua chelema) du fils de

Rav Eliahou Elkaïm,

Haïm Yéhouda ben Mazaltov

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et la paix.

Chabat Chalom.

Rav Chalom Bettan


Réponses intérieures

Par le Rav Eliahou Elkaïm

Ce n’est pas forcément pour les autres que l’on doit avoir des réponses à des questions idéologiques: c’est pour créer en soi une foi profonde et solide.

«Rabbi Eléazar disait: ‘Sois assidu dans l’étude de la Thora; sache ce qu’il faut répondre à l’hérétique; sache devant qui tu peine; Il est fiable, le Maître de ton travail, pour te payer le salaire de ton ouvrage’ ».

(Chapitre 2, Michna 14)

Dans son commentaire rappelé antérieurement, Maïmonide nous invitait à nous pencher sur les différentes philosophies dans le but de pouvoir répondre clairement aux questions polémiques.

Maïmonide précise cependant qu’il s’agit seulement des questions des renégats (apikoros), parmi les non-Juifs.

Quand aux renégats juifs, le Talmud est catégorique: il ne faut en aucun cas engager une discussion théologique avec eux.

En effet, il faut éviter la polémique, car durant les débats, ils seront peut-être amenés à renier l’existence divine avec encore plus de véhémence (Talmud Sanhédrin 38b).

Maïmonide ajoute: Les renégats d’origine juive ne peuvent avoir aucun espoir de retour, ni aucun remède à leur mal, comme il est dit:

«Ceux qui se dirigent vers elle (l’hérésie, Ndlr.) ne reviendront pas, ils seront incapables de retrouver le chemin de la vie» (Proverbes 2-19)

Le Rachbats ajoute: «Cette vérité s’applique aux Juifs qui ont connu la foi et qui ont choisi de plein gré la voie de l’hérésie. S’ils ont eu la suffisance de renier D.ieu, il n’y a plus aucun espoir qu’ils retournent vers Lui.

Toute discussion avec eux risque de les inciter à renier avec plus de véhémence la Présence divine.

En revanche, ceux qui ont été induits en erreur et qui mettent en doute la véracité de certains textes de la loi orale, il est non seulement permis, mais même recommandé d’engager la discussion, et de répondre à leurs questions, mêmes les plus offensives.» (Rachbats ibid.)

D’après certains commentateurs, le terme renégat (apikoros) employé par Rabbi Eléazar dans notre Michna trouve son origine dans des thèses du philosophe grec Epicure, qui prônait comme moyen unique pour trouver le bonheur, le matérialisme au détriment du spirituel.

D’après le Rachbats, nos maîtres ont ensuite élargit le sens du terme apikoros à tous ceux qui renient D.ieu et la Thora.

De nombreux Richonim (Maïmonide dans son commentaire sur la Michna Sanhédrin, Rabbénou Yona et d’autres), interprètent ce terme différemment. Il aurait pour racine le mot hefker, qui signifie un bien sans propriétaire.

Rabbénou Ovadia ajoute: «L’apikoros est celui qui a du mépris pour la Thora et la considère comme sans valeur, n’appartenant à personne (hefker, de la même racine que apikoros).

Autre explication: l’apikoros fait de sa propre personne un objet hefker. Il n’a pas pitié pour son âme, qui risque le châtiment divin pour avoir méprisé la Thora et ceux qui l’étudient.» (Rabbénou Ovadia ibid.)

Le Rachbats, comme on l’a vu, a une conception inversée, et il émet la supposition que le terme hefker lui-même est issu du terme apikoros.

En effet, à l’origine, le terme apikoros désignait ceux qui reniaient la Thora et considéraient que le monde n’a pas de maître. Par analogie, on a utilisé par la suite hefker pour désigner un bien sans propriétaire.

Trouver la faille

Quelles que soient les conclusions étymologiques, Maïmonide, comme on l’a vu, estime que le but de la maxime de Rabbi Eléazar est de nous préparer à répondre aux questions les plus provocantes.

Le Rachbats précise le contexte historique: «A l’époque des tannaïms (les maîtres de la Michna) et les Amoraïms (les maîtres du Talmud), les renégats posaient des questions sur les textes sacrés, remettant systématiquement en cause leur véracité: ils ne laissaient pas de répit aux Maîtres en Thora, qu’ils harcelaient de ces questions. De nombreux textes du Talmud rapportent ce genre de polémiques.

C’est la raison pour laquelle ces derniers ont institué la bénédiction dans la prière (Amida) intitulée Birkat haminim: la bénédiction au sujet des hérétiques.

Dans ce passage de la prière on implore D.ieu de bien vouloir les faire disparaître.

Les Maîtres en Thora de la génération suivante furent, pour leur part, confrontés aux Saducéens, qui mettaient en doute la transmission de la loi orale.

Cette opposition entre les Maîtres en Thora et leurs contestataires se poursuivit sous différentes formes jusqu’à notre époque (celle du Rachbats, ndlr.) et c’est pour cette raison que les Maîtres en Thora ont décidé qu’il était permis d’étudier les philosophies étrangères: afin de découvrir les failles de leurs raisonnements et les contradictions qui se trouvent dans leurs textes. (Rachbats ibid.)

Une conviction solide

Nous allons à présent découvrir une nouvelle approche, différente de celle de Maïmonide et du Rachbats. Citons tout d’abord Rabbénou Bahya:

"Rabbi Eléazar nous adresse le message suivant: ‘Même si tu es imprégné d’une foi profonde et ressentie, dont l’origine remonte à la transmission des générations qui t’ont précédé, et qui prend racine dans l’héritage qui est le nôtre depuis Moïse au Sinaï, de génération en génération;

"Tu ne dois pas te contenter de cette forme de foi (émouna): il est de ton devoir de découvrir, par une recherche personnelle et un effort intellectuel, les preuves irréfutables de cette foi. Ainsi tu acquérras une connaissance (yédia) issue de la sagesse (‘Hohma).

Car celui dont la foi n’est basée que sur la transmission risque fort, s’ilentend les arguments des renégats, d’être influencé, ne serait-ce que très légèrement, par leurs raisonnements.

C’est la raison pour laquelle il faut te préparer à posséder des réponses solides.»

(Rabbénou Bahya ibid.)

On le voit, c’est surtout vis-à-vis de soi-même, et pour ne pas être influencé par des raisonnements spécieux, qu’il faut chercher des réponses à toutes les questions.

Le ‘hassid Rabbi Yossef Yaavets va plus loin encore et il découvre dans les mots de Rabbi Eléazar: ‘sache ce qu’il faut répondre’ (da ma che tachiv), une intention particulière. Il aurait en effet suffit de dire «sache répondre» (da lehachiv).

Par ce choix syntaxique, Rabbi Eléazar précise que c’est surtout vis-à-vis de nous-même qu’il faut connaître les réponses: pour renforcer notre foi et la baser sur des arguments solides.

Il n’y a aucune raison de répondre aux renégats, et il faut même éviter tout contact avec eux: ce sont des mécréants (rechaïm), et nos Maîtres nous déconseillent même de regarder le visage d’un racha. Pourquoi alors préparer des réponsesà leurs éventuelles questions ?

Il précise cependant que si les circonstances nous obligent à répondre pour sanctifier le Nom divin (al kidouch Hachem), comme cela fut le cas à de nombreuses occasions dans l’histoire, il ne faut pas dérober à cette tâche.

Bien souvent, les Rois, les Gouverneurs, les Empereurs et autres tyrans ont obligés les Maîtres en Thora à répondre aux attaques des représentants d’autres religions. Il fallait alors présenter des réponses claires et convaincantes.

Le Rav Chlomo Wolbe zatsal, dans son ouvrage «Alé Chour» (vol. 2 p. 288-290), fait à ce sujet une mise au point d’une importance capitale:

"Il n’est absolument pas nécessaire de construire notre foi sur une réflexion philosophique sophistiquée. Il suffit d’utiliser des raisonnements basés sur le bon sens, sans se perdre dans des méditations compliquées. C’est le sens des mots de Rabbi Eléazar"

Une réflexion sincère et solide amène sans difficulté l’homme à découvrir qu’il est inconcevable de ne pas reconnaître l’existence de D.ieu.

C’est en établissant en soi des convictions claires et solides, par des raisonnements simples et éclatants, que l’on mettra en pratique la maxime de Rabbi Eléazar; ainsi, on sera assuré de rester toujours attaché à la Thora, dans toutes les situations.»