CHABAT YITRO

10 FEVRIER 2007 – 22 CHEVAT 5767

Jérusalem Paris Miami/Montreal
Allumage des bougies16.4017.4216.54
Sortie de Chabbath17.5818.5117.59

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser deux Dvar Thora sur la paracha de la semaine consacrés à la

Bar mitsva de EYTAN AYACHE.

Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde, via Internet.

Cette année, notre Institution a emménagé dans un nouveau bâtiment, qui porte dorénavant le nom de BEIT YEHOUDA VEHANA au nom de la famille qui a contribué au financement de cette acquisition ; notre reconnaissance est infinie tant pour cette famille que pour tous nos généreux donateurs et amis.

Le bâtiment est situé face au Mont HERZL et nous serons toujours heureux de pouvoir vous y accueillir avec les 18 enseignants, les 10 avrehim et les 153 étudiants.

Pour visualiser les photos et le film d'inauguration du bâtiment à Jérusalem vous pouvez cliquer sur le lien suivant :

http://www.daathaim.org/evenement/index.php

Ce Dvar Thora est écrit pour la guérison (refoua chelema) du fils de

Rav Eliahou Elkaïm,

‘Haïm Yéhouda ben Mazaltov

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et la paix.

Avec notre plus cordial Chabbat Chalom,

Rav Chalom Bettan

Un lien plus fort que l’amour

Par le Rav Eliahou Elkaïm

La révélation du Mont Sinaï comporte un élément très particulier, par lequel le peuple juif a été obligé, sous la menace, d’accepter la Thora. Pourtant, n’avons-nous pas dit, comme un seul cœur, le célèbre « naassé venichma », « nous ferons et nous comprendrons », proclamation enthousiaste de notre amour pour D.ieu et de notre acceptation des mitsvoth ?

« Moïse fit sortir le peuple du camp au devant de la Divinité, et ils s’arrêtèrent au pied de la montagne. » (Exode 19 ; 17)

Rachi rapporte (ad hoc), au nom du Talmud (Chabat p.88) que le mot « Tahtit » traduit littéralement ne signifie pas « au pied » de la montagne, mais « sous » la montagne, ce qui veut donc dire que le peuple juif fut placé sous le mont Sinaï.

Nos maîtres expliquent que D.ieu lui-même a soulevé la montagne au-dessus du peuple juif rassemblé, et leur a adressé les paroles suivantes:

« Si vous acceptez la Thora, tout ira bien. Sinon, cette montagne sera votre tombe. »

Quelle était la nécessité de cette menace, contrainte brutale émise par D.ieu, alors que le peuple juif s’était engagé face à D.ieu de façon entière et totale, par le célèbre « naassé ve nichma », « nous ferons et nous comprendrons », que Moïse avait transmis à l’Eternel :

« Moïse, de retour, convoqua les anciens du peuple, et leur transmit toutes ces paroles comme le Seigneur le lui avait prescrit. Le peuple entier répondit d’une voix unanime : « Tout ce qu’a dit l’Eternel, nous le ferons ! » Et Moïse rapporta les paroles du peuple au Seigneur. » (Exode 19 ; 7, 8)

L’étude approfondie d’un passage du Talmud (Avoda Zara p.2), va nous permettre de découvrir un texte aussi surprenant que plein d’enseignements. Ce texte décrit le débat qui aura lieu à la fin des temps entre D.ieu et les Nations non juives.

Aussi curieux que cela puisse paraître, ce texte va nous guider pour comprendre pourquoi la contrainte de D.ieu changea notre statut dans le monde…

Un dialogue surprenant

« A la fin des temps, D.ieu siégera, un Séfer Thora dans les bras, et appellera chaque personne qui aura œuvré pour la Thora afin qu’il reçoive sa rétribution.

Les Nations viennent alors se présenter devant le Créateur afin de faire valoir leurs droits. L’empire romain est le premier à revendiquer sa part.

Quelle a été votre activité dans le monde ? demande D.ieu.

Maître du monde, répondent les Romains, nous avons construit de très nombreuses places publiques, de nombreux thermes, nous avons rassemblé beaucoup d’argent et d’or. Et tout ce que nous avons réalisé, c’est uniquement pour que le peuple d’Israël puisse étudier la Thora.

Sottises ! s’exclame D.ieu. tout ce que vous avez fait, c’est dans votre propre intérêt.

Les places publiques ont été conçues pour s’y prostituer, les thermes pour assouvir votre volupté et en ce qui concerne l’or et l’argent, c’est à moi qu’il appartient. La Thora, existe-t-elle chez vous ? »

Au terme de cette discussion pour le moins animée et étonnante, les Romains sortent, déconfits.

Avant de nous pencher sur notre problème initial, à savoir la raison pour laquelle D.ieu a obligé les Juifs à accepter les mitsvoth, il est intéressant de comprendre l’attitude des Romains qui pleins de toupet, osent prétendre devant le Créateur du monde que les réalisations de Rome avaient été conçues pour aider les Juifs à étudier la Thora !

D’autant que la fin des temps sera une époque où le Mal et le mensonge seront abolis. Seule une Vérité absolue aura droit de citer, et chacun la verra comme le soleil en plein jour.

Le mensonge ne peut donc pas expliquer l’attitude romaine.

En réalité, à la fin des temps, l’humanité toute entière va découvrir que le Mal et le mensonge ont aussi participé de façon indirecte au but de la création : dévoiler l’unité de D.ieu. Car pour avoir la possibilité de choisir le bien, il fallait que le mal et la tentation existent. Et c’est dans cette optique que les Nations vont pouvoir revendiquer une part dans le plan divin.

Malheureusement pour elles, ces mêmes nations n’ont pas pris en compte que pour D.ieu, l’intention est capitale. Si réellement, les Nations avaient voulu adhérer au plan divin pour que l’Unité de D.ieu soit dévoilée, alors sans doute, auraient-elles eu un vrai droit de réponse. Dans leur cas, l’intention était toute autre. Mais cela ne les effraie pas outre mesure. Et le Talmud poursuit, en expliquant que les Nations reviennent devant le Créateur :

Maître du monde, nous as-tu placées sous la montagne, en nous menaçant de nous enterrer sous elle si nous n’acceptions pas Tes mitsvoth ? Nous as-tu obligé à accepter la Thora comme tu l’as fait pour le peuple d’Israël ?

Et qu’est-il advenu, répond D.ieu, des sept commandements que vous avez reçus (les sept lois adressées aux descendants de Noé, les Nations non juives Ndlr) ? Les avez-vous appliquées ? Bien au contraire, le prophète ‘Habakouk, avait « abrogé » en Mon Nom ces lois.

Cette réponse semble, à première vue, faible, car les Nations pourraient dire : « Si tu nous avais forcé à accepter ces sept lois, nous les aurions accomplies, comme ce fut le cas pour les Juifs. »

La récompense du fauteur

Le Talmud s’interroge alors sur le sens de cette abrogation annoncée par le prophète. Signifie-t-elle que ces lois sont annulées, (« Puisque vous ne voulez pas respecter mon ordre, je l’abroge, vous n’êtes plus coupable »), ce qui signifierait en quelque sorte que l’on récompenserait le fauteur ? Certainement pas.

Doit-on comprendre que cette abrogation concerne la récompense de ces mitsvoth, et que les Nations ne peuvent plus recevoir de récompense pour le respect des Lois qui leur sont adressées ? Impossible encore, car Rabbi Meïr affirme que le non juif qui étudie la Thora peut atteindre le même niveau que le Grand Prêtre au Temple.

Le Talmud en arrive donc à la conclusion que les non juifs, bien qu’assignés à respecter ces lois seront désormais considérés comme s’ils agissaient de leur propre gré, et non par la force d’un ordre divin.

De gré ou de force ?

Le Talmud cite le principe énoncé par Rabbi Hanina : « Celui qui agit sous la force d’un ordre divin a plus de mérite que celui qui accomplit une mitsva sans y être obligé. »

A première vue, ce principe semble illogique : celui qui agit de son propre gré le fait par amour et son mérite devrait être plus grand que celui qui est forcé d’obéir.

L’explication classique est de considérer au contraire la soumission comme le plus grand acte d’amour possible. Celui qui se soumet accepte de s’effacer totalement devant la volonté divine. Là est sa grandeur.

Mais dans notre problématique, cette explication ne nous est d’aucune aide, car les Nations, étant tenues de respecter les sept lois de Noé, font, elles aussi, acte de soumission.

Il nous faut appréhender une toute autre approche, celle développée par le Ramhal (Le Rav Moché ‘Haïm Luzzato), dans « Daat Tevounoth » pour comprendre le principe de Rabbi ‘Hanina et en quoi D.ieu nous a élevé à un niveau tout à fait spécial en nous obligeant à accepter Ses lois.

Qu’il ait été fait de gré ou par la force de l’ordre de D.ieu, ne change pas la valeur de l’acte, mais sa dimension, son impact.

L’acte imposé par le Créateur possède une nouvelle dimension, en possédant la caractéristique d’agir sur toute la création.

En acceptant la Thora de plein gré et sans retenue, le peuple juif a mérité d’être obligé. Ainsi, son lien avec D.ieu devient indélébile, éternel, ne dépendant d’aucune circonstance extérieure, d’aucun revirement intellectuel ou sentimental.

Le peuple juif accède à partir de cet instant, instant où la montagne est au dessus de lui, à une responsabilité que l’humanité n’a jamais atteinte. S’il trébuche, s’il échoue dans sa mission, il entraîne le néant, le vide, dans la mesure où la rupture avec son Créateur n’est plus possible. Car les Juifs ont été investis d’une mission et d’une responsabilité, celle de diriger à travers leurs actes tout l’équilibre de la création. S’il réussit, il accède à une perfection jamais atteinte. Par cette dimension tout à fait spéciale que D.ieu a bien voulu accorder au peuple juif, ce dernier agit sur le fonctionnement même de la Création, de notre monde visible jusqu'aux sphères célestes.

La contrainte et la menace sont là pour faire comprendre au peuple juif que sa mission et son lien avec la Thora ne sont plus révocables.

Le texte d’Avoda Zara est limpide. Les Nations, qui n’ont pas respecté les sept lois de Noé, prouvent qu’elles ne peuvent mériter la contrainte, et l’élévation qu’elle entraîne. Leur amour pour le Créateur n’étant pas suffisamment fort pour passer le premier barrage, chercher une relation plus forte et plus conséquente n’a aucun sens.

Accepter les Lois de D.ieu par amour n’était qu’une introduction pour le peuple juif à une autre dimension de ses actes. Cette dimension-là fut atteinte au Mont Sinaï par toutes les âmes juives, car toutes étaient présentes à ce moment-là. Malgré les défaillances et les égarements de l’exil, ce lien entre les âmes juives et D.ieu est éternel, jusqu’à la fin des temps.