Chabbath Parachat Chela’h Le’ha

24, 25 juin 2005 – 17, 18 Sivan 5765

Jérusalem Montréal Paris
Allumage des bougies 19 h 13 21 h 40 21 h 38
Sortie de Chabbath20 h 31 23 h 0523 h 04

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le Dvar Thora de cette semaine avec lequel nous poursuivons le deuxième chapitre des «Maximes des pères» (Pirké Avoth).

Les commentaires sur le premier chapitre ont fait l’objet d’un livre, le troisième volume de notre série «Dvar Thora».

Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde via Internet.

Comme nous vous l’avons déjà annoncé, la YéchivaDaat ‘Haïm est désormais installée dans de nouveaux locaux, situés face au Mont Herzl à l’entrée de Bayit Vegan, 1, Rehov Hapisga, à Jérusalem (bâtiment Yad Harav Herzog où depuis 40 ans se succèdent les prestigieux commentateurs et chercheurs des 28 tomes de l'Encyclopédie Talmudique et de divers commentaires du Talmud)

Nous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.

Ce Dvar Thora est consacré à la guérison (refoua chelema) du fils de Rav Eliahou Elkaïm, ‘Haïm Yéhouda ben Mazaltov.

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et la paix.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat Chela’h Le’ha

24, 25 juin 2005 – 17, 18 Sivan 5765

Un choix crucial

Par Rav Eliahou Elkaïm

A certains moments de la vie, s’offrent à nous des options qui peuvent s’avérer fondamentales. A nous de ne pas nous égarer dans de faux calculs…

Il avait coutume de dire: ‘L’homme inculte ne craint pas le pêché, l’ignorant ne peut être tout à fait pieux. Le timide n’apprend pas, le coléreux n’enseigne pas, Tous ceux qui font beaucoup de commerce ne deviennent pas sages. Et là où il n’y a pas d’homme, efforce-toi d’en être un.’»

(Chapitre 2, Michna 4)

Cette semaine, nous abordons la dernière partie de la maxime de Hillel.

D’emblée, nous remarquerons que la forme employée diffère du début de cette maxime.

En effet, le style de la première partie dénote une affirmation sans équivoque: «Le timide n’apprend pas, le coléreux n’enseigne pas ».

A l’inverse, la fin de la maxime est plus tempérée: Tous ceux qui font beaucoup de commerce ne deviennent pas sages», ce qui sous-entend que certains peuvent réussir dans les deux domaines.

Le Midrach Chemouel explique cela par le fait que certains cas exceptionnels sont cités dans le Talmud, d’hommes qui ont pu mener les deux fonctions de front.

Ilfa et Rabbi Eleazar ben Harsoum notamment, furent de grands hommes d’affaires et réussirent également à atteindre un très haut niveau de connaissances en Thora.

Oublier les affaires

Mais il ne faut pas s’y tromper, ce sont là des exceptions, qui ne confirment pas la règle, qui veut justement que pour espérer devenir un sage, il faut s’éloigner des grandes ambitions matérielles.

D’ailleurs, Maïmonide dans son commentaire sur notre Michna, cite un texte de nos maîtres (Talmud Erouvin 55a) qui interprète le verset du Pentateuque:

«Car cette loi que je t’impose en ce jour (…), elle n’est pas au ciel (…), elle n’est pas non plus au-delà de l’océan» (Deutéronome 30-11,13)

Rabbi Yo’hanan explique: «La Thora ne se trouve pas chez les orgueilleux car le ciel est une allusion à ceux qui s’imaginent toucher le ciel, summum de l’orgueil, ni chez les grands commerçants, qui voyagent à travers le monde, traversant les mers pour leurs affaires.

Dans «Michné Thora», il ajoute:

«C’est la raison pour laquelle nos maîtres ont dit: ‘Restreins tes affaires (essek) et consacres-toi à l’étude de la Thora» (Avoth 4-10)»

(Hil’hot Talmud Thora 3-9)

Rabbi Yaakov Kamenetski, dans son commentaire surAvoth, «Emeth Leyaakov» (ibid.), remarque que Maïmonide, par le parallèle qu’il fait entre le texte du Talmud et celui de la Michna, nous dévoile la véritable pensée de Hillel.

On aurait tendance à penser que l’on doit limiter une activité professionnelle, si elle est manuelle (mela’ha), car elle n’apporte pas grand-chose à l’esprit, et laisser ainsi la place à l’étude de a Thora.

Et l’on aurait également tendance à croire que les affaires (essek) peuvent justifier un plus grand investissement de temps, dans la mesure où elles nécessitent une agilité de la réflexion, et où les voyages procurent à l’homme une ouverture d’esprit, activité donc utile pour la compréhension des textes du Talmud.

C’est pour nous mettre en garde contre de telles idées que Maïmonide cite le texte du Talmud dans Erouvin, où l’on voit, par expérience que la Thora ne peut pas être réellement l’apanage de ceux qui se consacrent à leurs affaires.

Cette mise en garde de Maïmonide concerne, de nos jours, tous les développements de l’idée contre laquelle il s’insurge: on pense en toute bonne foi que certaines activités, comme une activité professionnelle, ou encore l’investissement dans des études profanes, sont indispensables pour acquérir une intelligence construite et une culture vaste, préparation nécessaire pour l’étude de la Thora.

Mais la réalité prouve le contraire: c’est la Thora qui procure aux jeunes, comme aux moins jeunes, la plus grande agilité d’esprit et une incomparable compréhension du monde.

L’expérience montre également que la préoccupation professionnelle est si envahissante, qu’elle empêche, à terme, l’homme de s’investir dans l’étude de la Thora.

Pas de fausse modestie

Le dernier volet de cette maxime est l’objet de nombreux commentaires:

«Et là où il n’y a pas d’homme, efforce-toi d’en être un».

Nous allons tenter d’en citer les principaux, en commençant par celui de Rabbénou Ovadia, qui rejoint celui de Moché Al-chaquer, cité par le Midrach Chmouel.

«Si la communauté a besoin d’un dirigeant spirituel, et que personne n’est à la hauteur de cette responsabilité, ne te dérobes pas en te justifiant par une soi-disant humilité.

Car ton devoir à ce moment-là est d’assumer cette charge.»

Rabbénou Yona propose pour sa part deux interprétations.

  • Si tu te trouves dans un endroit où personne ne t’incite à t’élever dans la Thora et l’accomplissement des commandements, deviens ton propre conseiller, ton propre éducateur.
  • S’il ne se trouve pas autour de toi des personnes d’un plus haut niveau que le tien en Thora, ne t’imagine pas être le grand de la génération. Et même si c’est le cas, imagine toi être un contemporain des maîtres du Talmud, ce qui te permettra de retrouver la motivation pour te rapprocher de leur savoir.

Imagine même que tu fais partie de la génération des prophètes et que tu côtoies Moïse, tu créeras en toi une soif inaltérable d’apprendre et de progresser.

L’auteur du Tiféret Israël, ajoute:

«Si tu vois que tes contemporains se sont éloignés de la Thora, mets ta confiance dans la force que D.ieu a placée en toi, et pense à l’aide qu’Il te procure en permanence, et ainsi, trouve la force pour combattre l’ignorance et ceux qui veulent éloigner Israël de D.ieu.

Sois un homme

Rabbi Yossef Yaavets, ajoute que ceux qui sont indifférents à ce type de situation et se dérobent à leurs responsabilités ne méritent même pas le titre d’homme.

C’est ce que la Thora exprime en disant: ‘Là où il n’y a pas d’hommes’.

Rachi propose une autre interprétation:

«Si dans ton entourage, personne n’est capable, ou ne veut, se consacrer aux affaires publiques, tu dois assumer cette responsabilité. Mais si d’autres peuvent le faire, il est préférable pour toi de te consacrer à l’étude de la Thora.»

Le Midrach Chmouel cite un très vieux maître, qui lui a expliqué cette maxime de la façon suivante:

«‘Là où il n’y a pas d’hommes’, signifie que lorsque tu te trouves seul, personne ne pouvant ni voir ni connaître ce que tu fais, sois encore un homme, et surmonte encore et toujours ton mauvais penchant (yetser hara

Nous conclurons par le commentaire de Rabbi ‘Haïm de Volozhine, qui est essentiel:

«Il est important pour l’homme de trouver des instants où il est seul avec lui-même.

C’est alors qu’il doit éveiller en lui la sensation de la présence de D.ieu, et la sensation qu’Il voit tout et qu’Il sait tout.»

Cette dernière interprétation nous amène à l’un des enseignements les plus fondamentaux des maîtres de l’éthique(moussar) :

Il ne peut y avoir de véritable travail vers D.ieu (Avodat Hachem), si l’homme est en permanence au milieu des autres.

Il doit déterminer des moments fixes pour se découvrir et vivre son lien avec D.ieu de la façon la plus intime.

Celui qui n’en n’est pas capable n’atteindra jamais la vraie profondeur dans sa relation avec D.ieu, ni dans mission qu’il accomplit pour son Créateur.

Chabbath Chalom