Chabbath Parachat Behar
20, 21 mai 2005 – 11, 12 Iyar 5765
Jérusalem | Montréal | Paris | |
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Allumage des bougies | 19 h 11 | 21 h 38 | 21 h 37 |
Sortie de Chabbath | 20 h 14 | 23 h 03 | 22 h 33 |
Très chers amis,
J’ai le plaisir de vous adresser le Dvar Thora de cette semaine avec lequel nous poursuivons le deuxième chapitre des «Maximes des pères» (Pirké Avoth).
Les commentaires sur le premier chapitre ont fait l’objet d’un livre, le troisième volume de notre série «Dvar Thora».
Dans le but de diffuser encore et toujours le message éternel de la Thora, nous envoyons ce Dvar Thora à des milliers de personnes francophones dans le monde via Internet.
Comme nous vous l’avons déjà annoncé, la YéchivaDaat ‘Haïm est désormais installée dans de nouveaux locaux, situés face au Mont Herzl à l’entrée de Bayit Vegan, 1, Rehov Hapisga, à Jérusalem (bâtiment Yad Harav Herzog où depuis 40 ans se succèdent les prestigieux commentateurs et chercheurs des 28 tomes de l'Encyclopédie Talmudique et de divers commentaires du Talmud)
Nous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.
Ce Dvar Thora est consacré à la guérison (refoua chelema) du fils de Rav Eliahou Elkaïm, ‘Haïm Yéhouda ben Mazaltov.
Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et la paix.
Chabbath Chalom,
Rav Chalom Bettan
Chabbath Parachat Behar
20, 21 mai 2005 – 11, 12 Iyar 5765
La patience récompensée
Par le Rav Eliahou Elkaïm
Parvenir à ancrer en soi la patience est un signe d’excellence, particulièrement apprécié par le Créateur. Mais il ne faut pas hésiter, pour cela, à briser certaines constituantes de notre personnalité.
Il avait coutume de dire: ‘L’homme inculte ne craint pas le pêché, l’ignorant ne peut être tout à fait pieux. Le timide n’apprend pas, le coléreux n’enseigne pas, quiconque fait beaucoup de commerce ne devient pas savant. Et là où il n’y a pas d’homme, efforce-toi d’en être un.’»
(Chapitre 2, Michna 4)
«Le coléreux ne peut pas enseigner». Le terme employé dans le texte est kapdan, qui signifie littéralement l’intransigeant, celui qui manque de patience et de souplesse, forme de caractère qui se traduit bien souvent par des excès de colère.
Hillel, en quelques mots, nous enseigne un principe pédagogique fondamental.
Un élève ne pourra pas optimiser sa concentration, son attention et son intérêt, si son maître ne lui offre pas un visage détendu et souriant, et qu’il n’est pas disposé à écouter avec patience toutes ses questions.
Comment comprendre alors l’enseignement du Talmud (Ketoubot 103b): il est dit au sujet de Rabbénou Hakadoch qu’il donna, juste avant sa mort, à son successeur, Rabban Gamliel, le conseil d’être très ferme avec ses élèves, et même de leur inspirer la crainte.
Comment concilier ces deux visions pédagogiques apparemment diamétralement opposées?
Une colère contrôlée
Maïmonide fait la part des choses (Hil’hot Talmud Thora 4-5):
«L’élève ne doit pas avoir honte s’il ne comprend pas un sujet alors que ses camarades y sont parvenus dès la première ou la deuxième fois.
Car s’il ne parvient pas à surmonter cette honte, il assistera au cours sans aucun résultat.
C’est la raison pour laquelle nos maîtres ont enseigné: «Le timide ne peut pas apprendre et le coléreux ne peut pas enseigner»
Mais la deuxième partie de cette règle ne s’applique que si la raison de cette incompréhension est la difficulté du sujet, ou le manque de maturité intellectuelle des élèves.
En revanche, s’il apparaît clairement aux yeux du maître que la raison pour laquelle le sujet reste incompris est le manque de sérieux et d’effort de ses élèves, l’enseignant a le devoir de manifester son mécontentement, et de les admonester pour les motiver.
C’est à ce propos que nos maîtres nous disent: «Sème la crainte chez tes élèves».
C’est également la raison pour laquelle il ne sied pas au maître d’avoir un comportement léger devant ses élèves, ni de s’amuser devant eux, ni de manger et boire en leur présence, car il ne pourra pas dans ces conditions leur inspirer de la crainte.
C’est seulement ainsi que les élèves pourront avancer rapidement dans l’étude.»
L’auteur de «Tiféreth Israël» remarque à ce sujet que l’expression employée par Rabbénou hakadoch est littéralement: «Jette les réprimandes sur tes élèves» (zerok mara batalmidim).
Cette expression signifie que la colère du maître doit être extérieure à lui, et disparaître tout à fait dès que le message a été transmis.
Bien évidemment, le maître, pour remplir son rôle, ne doit pas ressentir de la colère, ni même un emportement, ni encore moins ressentir une haine quelconque à l’encontre de ses élèves.
On le voit, l’enseignement implique un investissement très approfondi de la part du maître dans le domaine de son propre caractère (travail des middot).
Quatre siècles de vie en plus!
Un texte clef du Talmud va nous montrer combien ce travail est apprécié par le Créateur:
«Rabbi Pereida avait un élève auquel il fallait répéter une leçon quatre cents fois avant qu’il ne la comprenne parfaitement.
Un jour, Rabbi Pereida fut convoqué pour s’occuper d’une mitsva.
Mais il ne partit pas avant d’avoir répété quatre cent fois avec son élève le sujet traité.
Mais cette fois, après ce travail, l’élève ne comprenait encore pas.
Rabbi Pereida lui demanda pourquoi les quatre cent répétitions n’avaient pas suffit. L’élève répondit:
«Sachant que mon maître était appelé à une autre occupation, j’ai été légèrement troublé et je n’ai pas réussi à me concentrer, pensant à chaque instant que le Rav allait devoir partir»
Loin de se décourager, Rabbi Péreida lui dit: «Essaie de te concentrer, et je vais t’enseigner encore.»
Et le Rav répéta à nouveau quatre cent fois la leçon!
Une voix céleste (bat-kol) se fit alors entendre et s’adressa à Rabbi Pereida:
«- Que préfères-tu en récompense de ton acte. Quatre cent ans de vie supplémentaire ou l’entrée au monde futur (Olam haba) pour toi et ta génération?
Je préfère que moi et ma génération puissions jouir du Olam haba
D.ieu dit alors: «Accordez-lui les deux récompenses!» (Talmud Erouvin 54b)
Rabbi Yossef ‘Haïm de Bagdad (le Ben Ich ‘Haï) dans son commentaire sur les Aggadoth du Talmud, (Ben Yehoyada, ibid.) fait une première remarque:
Comment se fait-il que les efforts quotidiens de Rabbi Pereida n’ont jamais suscité une voix céleste pour lui annoncer sa récompense. Cette persévérance assidue était-elle moins louable que ce qui se passa ce jour-là?
Le Ben Ich ‘Haï explique que ces quatre cent fois supplémentaires dépassent tout l’investissement de Rabbi Pereida jusque-là.
En effet, admettre avec calme que quatre cents explications ont été vaines pour une raison a priori inepte, puis dire à cet élève avec la plus grande douceur que l’on va recommencer, sans lui manifester le moindre mécontentement, est un surpassement de ce que la patience humaine peut supporter.
Cela explique donc une récompense à la mesure de cette excellence*.
Ancrer en soi la patience
Rabbi ‘Haïm Chmoulevitz, qui fait la même remarque, ajoute une note supplémentaire:
Lorsqu’un élève demande un grand investissement de temps, surtout lorsque les autres comprennent plus vite, on peut avoir l’impression de perdre son temps.
Dans le cas d’un grand Maître (talmid ‘ha’ham) comme Rabbi Pereida, un tiers aurait pu penser que répéter la leçon à cet élève était du temps gâché, car seul, ce grand maître aurait pu étudier à un très haut niveau.
Et même en considérant qu’enseigner apporte beaucoup au maître, Rav Pereida aurait pu enseigner à un autre élève, plus rapide et plus brillant, et un autre Rav, peut être moins érudit, aurait pu répéter inlassablement à sa placeà l’élève en question !
Mais la récompense offerte par D.ieu Lui-même nous donne la bonne perspective.
A travers cette inlassable répétition, Rabbi Pereida a ancré en lui la patience et la persévérance (métinout). Et c’est, en soi, un gain immense.En outre, le temps n’a pas été perdu car grâce aux quatre cents années octroyées par D.ieu, ce temps a même été largement dépassé.
Plus encore, le fait d’avoir brisé un trait de caractère (chevirat hamidot), qui constitue un surpassement dans ce domaine, est un élément qui fut grandement apprécié par le créateur. Et c’est l’un des motifs qui peut amener la délivrance à toute la communauté, comme ce fut le cas ici.
(Si’hot moussar vol 3, p.52 et p.95)
* Note: Le Ben Ich ‘Haï fait une deuxième remarque sur ce texte du Talmud: En lui accordant finalement les deux propositions initiales, D.ieu lui offre bien plus que cela. En effet, en vivant quatre cent ans de plus, Rabbi Pereida multiplie le nombre de ses contemporains par 20, c’est donc vingt fois plus de personnes qui sont concernées par cette entrée au monde futur.
Le Ben Ich ‘Haï cite à ce sujet le Ari zal, qui explique que quand D.ieu parle de la génération de Rabbi Pereida , il ne s’agit pas de ceux qui ont vécu à son époque, mais de tous ceux dont l’âme (nechama) est une émanation (nitsoz) de l’âme de Rabbi Pereida. Cela n’est donc pas lié au temps.
Chabbath Chalom