Au nom du saint et vénéré Rabbi Haïm Cohen zt’l

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Parachat Tsav – Chabbath Hagadol

2, 3 avril 2004 – 11, 12 nissan 5764

Fête de Pessah :

5, 6, (et 7 en dehors d’Israël) avril

14, 15 (et 16 en dehors d’Israël) nissan

Horaires de Chabbath :

A Jérusalem A Paris

Allumage des bougies : 17 h 24 Allumage des bougies : 20 h 03

Sortie de Chabbath : 18 h 36 Sortie de Chabbath : 21 h 13

Horaires de la fête :

A Jérusalem A Paris

Allumage des bougies : 17 h 26 Allumage des bougies : 20 h 07

Sortie de la fête : 18 h 39 Allumage 2ème jour : après 21 h 17

Sortie de la fête : 21 h 19

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le Dvar Thora de cette semaine.

Cette semaine, nous vous proposons une réflexion sur la fête de Pessah.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom et nos plus sincères souhaits de Pessah cacher vessameah,

Rav Chalom Bettan


Parachat Tsav – Chabbath Hagadol

2, 3 avril 2004 – 11, 12 nissan 5764

La vraie liberté

Par le Rav Eliahou Elkaïm

En nous penchant sur la mitsva qui consiste à boire quatre coupes de vin durant la soirée du Séder, nous allons découvrir une nouvelle conception de la liberté (‘hérouth), assez différente de celle du monde occidental…

Chaque année, à

Pessah, nous commémorons la libération du peuple juif du joug de l’esclavage en Egypte.

Le thème de la liberté (‘hérouth) est largement évoqué tout au long de la soirée du Séder.

Dès le début, nous exprimons nous aspiration à être des hommes libres (bené ‘horin).

L’une des lois relatives à la soirée du Séder

attire notre attention. La Michna (Pessahim 10 ; 6) nous enseigne :

« Il est permis de boire du vin entre les trois premières coupes, mais pas entre la troisième et la quatrième. »

Cette loi (halacha) est codifiée dans le Choulhan Arouh (Orah ‘Haïm 479 ; 1).

Mais quelle est la raison de cette différence ?

D’après le Talmud de Jérusalem, le motif de cette restriction réside dans le caractère enivrant et assoupissant du vin.

En effet, le Talmud de Jérusalem (ibid.) explique que le vin supplémentaire consommé après le repas risque d’endormir, ce qui empêcherait de réciter de Hallel (louanges) qui clôture, avec la quatrième coupe de vin, la soirée du Séder.

Un deuxième texte du Talmud de Jérusalem (Méguila 3 ; 5) laisse supposer qu’il existe d’autres raisons, plus profondes, à cet interdit.

Ce texte établit un parallèle entre les quatre coupes de vin et les quatre

parachioth(sections de la Thora) lues dans la période qui précède Pessah

: il est recommandé de ne pas faire d’interruption entre la troisième et la quatrième paracha (Para et Hahodech) que l’on lit systématiquement deux semaines consécutives.

On le sait, les motifs cités par nos maîtres concernant une mitsva

ne sont pas exhaustifs, et il en existe souvent d’autres, qui ne sont pas mentionnés dans les textes.

Dans un article publié dans Kol Hathora (n°17), le Rav Mordehaï Miller

zatsal

nous donne les éléments pour découvrir l’un des sens cachés de cette halacha.

Un peuple d’esclaves

la mitsva

des quatre coupes de vin a été instituée par nos Maîtres pour rappeler les quatre termes utilisés par D.ieu pour annoncer la libération (guéoula) d’Egypte.

« Je veux vous soustraire aux tribulations de l’Egypte, et vous délivrer de sa servitude, et Je vous affranchirai avec un bras étendu (…) Je vous adopterai pour peuple (…) »

(Exode 6 ; 6, 7)

Le Maharal (Guevouroth Hachem chapitre 30) nous éclaire sur le sens particulier de chacun de ces termes.

« L’annonce faite à Abraham par D.ieu lui révélant que sa descendance serait exilée en Egypte a été exprimée dans ce que l’on appelle ‘l’alliance entre les morceaux’ (brit ben habétarim), épisode décisif dans la destinée du peuple juif.

Durant cette annonce divine, les différents aspects de cet exil furent développés :

« D.ieu dit à Abraham : ‘Sache le bien, ta postérité séjournera sur une terre étrangère, où elle sera asservie et opprimée durant quatre cents ans (…) »

(Genèse 15 ; 13)

Dans ces mots sont annoncés les phases de l’exil.

La première est le déplacement dans un pays étranger, et par là-même, on est privé de la proximité de D.ieu en terre d’Israël.

En outre, et c’est la deuxième phase, même si on est libre, on ne jouit pas des mêmes droits que les citoyens du pays : on a la sensation d’être déraciné.

La troisième est l’asservissement : le peuple juif devient un peuple d’esclaves.

La quatrième est l’oppression proprement dite, qui dépasse la simple condition d’esclaves.

Le processus de délivrance agit en sens inverse. La première phase arrête l’oppression, la seconde affranchit de l’esclavage, la troisième enfin change le statut des Juifs qui sont dépourvus des droits du pays où ils vivent.

Nous comprenons à présent les trois premiers termes employés pour annoncer la délivrance.

Mais être affranchis de l’emprise des Egyptiens n’est pas un but en soi, si l’objectif est de devenir une nation comme les autres.

C’est pour cela qu’il y avait quatre termes employés par D.ieu pour annoncer la libération d’Egypte, le quatrième terme signifiant que les Juifs allaient devenir le peuple de D.ieu, Ses serviteurs.

On le voit, après l’annonce des trois phases de la libération (guéoula), s’ajoute immédiatement la quatrième, complément indissociable, attachant d’un lien indélébile les Juifs au Créateur.

Car il est inconcevable que le peuple juif devienne une nation comme les autres.

Même s’il est libéré de toute emprise étrangère, il faut qu’il entre instantanément dans le domaine particulier de D.ieu.

Réalité et utopie

Nos Maîtres nous enseignent que plus encore que leur corps, c’était les âmes (nefech) des enfants d’Israël qui se trouvaient en exil sous Pharaon.

Les quatre aspects de l’asservissement et de la libération développés par le Maharal ont un parallèle qui concerne l’asservissement de l’âme.

Nous allons retrouver ces mêmes stades dans l’oppression et la libération de l’âme :

1 - L’oppression que subit l’âme est entraînée par toutes les formes de dépravation ou d’idolâtrie dans lesquelles elle est impliquée.

2 - Même lorsque l’âme est libérée la souffrance qu’entraîne la dépravation, elle reste ‘esclave’ si elle ne peut se consacrer au service de son Créateur.

Les mots du Ramhal sont éloquents à ce sujet dans le chapitre 2 du ‘Sentier de rectitude’:

« L’un des stratagèmes les plus efficaces du mauvais penchant (yetser hara) est de canaliser en permanence toutes les forces de l’homme afin qu’il n’accède jamais à la sérénité qui lui permettrait de méditer sur son comportement. (…)

Cela est comparable à la politique de Pharaon qui déclara :

« Qu’il y ait donc surcharge de travail pour eux, et qu’il y soient astreints »

(Exode 5 ; 9)

Son intention était claire : ne laisser aucun moment libre aux enfants d’Israël, pendant lequel ils auraient pu organiser un soulèvement.

Seul un travail ininterrompu pouvait empêcher toute réflexion sur leur triste condition.

Et c’est exactement de cette façon qu’agit Leyetser hara

sur l’homme. »

Cette forme d’asservissement de l’âme correspond donc au deuxième stade de l’exil.

3 - Mais même lorsque l’homme parvient à s’affranchir de cette emprise du yetser hara, son âme n’est pas encore libérée, tant qu’il se sent encore étranger.

S’il n’évolue pas dans un milieu social et dans un contexte familial où il s’épanouit spirituellement, il se sentira toujours étranger et inférieur, et il perdra de sa vitalité.

4 - La quatrième et dernière phase, indissociable des autres, est celle où il pénètre dans le domaine de D.ieu.

Si l’homme ne cultive pas cette sensation d’être au service de son Créateur, sa libération ne portera pas vraiment ses fruits et n’entraînera pas de vrais résultats.

Car l’homme ne peut pas être son propre maître. S’il est libéré d’un joug extérieur, se crée alors un vide.

Ce vide, s’il n’est pas comblé par une soumission à D.ieu et la volonté profonde de le servir, sera rempli par de nouvelles formes d’asservissement, au matérialisme par exemple ou à d’autres idéaux imaginaires.

Et ce qui est vrai dans le spirituel l’est aussi dans la recherche de perfectionnement de soi.

Le seul moyen de réussir et de s’épanouir est de créer, dans chaque domaine, une implication positive qui remplace immédiatement les éléments négatifs desquels on s’est détaché.

Nos Sages disent :

« Ecartes-toi du mal et fais le bien (Sour mera vé assé tov) »

On ne peut se contenter d’extirper le mal, il faut instantanément le remplacer par le Bien.

Il n’existe aucune liberté absolue au niveau de l’homme, car cela va à l’encontre de sa nature.

C’est le véritable sens de la loi qui interdit de ‘créer un vide’ entre la troisième et la quatrième coupe de vin, qui représentent respectivement l’affranchissement, immédiatement suivi par l’entrée au service de D.ieu.

Car le concept d’homme libre tel qu’il est perçu par les Nations n’est qu’une utopie.

La seule forme véritable d’affranchissement de l’âme est de réaliser son rôle véritable sur terre : servir son Créateur et se rapprocher de Lui.

Chabbath Chalom