Au nom du saint et vénéré Rabbi Haïm Cohen zt’l

1, Rehov Hapisga, Bayit Vegan, Jérusalem Tel : 00 972 2 643 07 20 Fax : 00 972 2 643 07 19

12, rue Notre Dame des Victoires 75002 Paris Tel : 01 42 27 21 11 Fax : 01 42 27 54 91

Email : daat.haim@piximel.com Site : www.daathaim.org

Chabbath Parachat Netsavim – Vayéle’h

10, 11 septembre 2004 – 24, 25 éloul 5764

Jérusalem - Paris

Allumage des bougies : 18 h 16 - Allumage des bougies : 19 h 56

Sortie de Chabbath : 19 h 26 - Sortie de Chabbath : 21 h 01

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le dvar Thora de cette semaine sur les Pirké Avoth, « Maximes des pères ».

Nous tenions également à vous annoncer qu’avec l’aide de D.ieu, nous avons emménagé dans de nouveaux locaux, pouvant accueillir dans de bonnes conditions tous nos élèves, y compris ceux de la nouvelle promotion.

Ces nouveaux locaux sont situés face au Mont Herzl à l’entrée de Bayit Vegan, 1, Rehov Hapisga, à Jérusalem (bâtiment Yad Harav Herzog où depuis 40 ans se succèdent les prestigieux commentateurs et chercheurs des 28 tomes de l'Encyclopédie Talmudique et de divers commentaires du Talmud)

La nouvelle promotion qui commence son cycle d’étude à la Yéchiva, est composée de 38 étudiants très motivés et d’un excellent niveau qui promettent de devenir de brillants dirigeants pour le judaïsme et la Thora.

Nous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et le Chalom.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat Netsavim – Vayéle’h

10, 11 septembre 2004 – 24, 25 éloul 5764

Le secret de l’équilibre social

« Rabban Chimon ben Gamliel disait : ‘Le monde se maintient sur trois choses : la justice, la vérité et la paix, comme il est dit : ‘Rendez des sentences de vérité et de paix dans vos portes’ (Zacharie 8 ; 16)’. »

(Chapitre 1, Michna 18)

Dans sa maxime, Rabban Chimon ben Gamliel nous donne les règles fondamentales de la bonne marche de la société. Dans les moments troublés que vivent actuellement toutes les démocraties, c’est une réflexion qui porte à conséquence…

On se souvient de l’affirmation de Simon le Juste, dans la deuxième Michna de ce chapitre : « Le monde tient sur trois choses : sur la Thora, sur le Service de D.ieu et sur la bienfaisance ».

Et l’on remarquera sûrement la ressemblance entre les deux formules employées.

Cela signifierait-il que Rabban Chimon ben Gamliel contredit l’affirmation de Simon le Juste, et qu’il pense que le monde repose sur des bases différentes ?

Cela est difficilement concevable.

En réalité, dans de nombreuses versions de cette Michna, c’est le terme ‘kayam’(se maintient) qui est employé, alors que dans la maxime de Simon le Juste, on trouvait

‘omed’(se tient).

Rabbénou Bahya explique cette différence par le fait que ‘omed’

est généralement employé pour des éléments spirituels, origines de la création du monde.

Omed

vient de la racine ‘laamod’(se tenir debout) ;

‘amoud’

signifie un pilier.

Rabbénou Bahya appuie son développement en rapportant un verset dans Job :

« Les colonnes du ciel (

amoudé chamayim

) frémissent et s’effarent sous sa menace » (Job 26 ; 11)

On le voit, le terme ‘amoud’

est utilisé pour désigner une réalité qui n’est pas matérielle. Dans la maxime de Simon le Juste également, le terme ‘omed’ accompagne des éléments spirituels comme la Thora, le service divin et la bienfaisance : concepts du monde de l’esprit.

On emploie donc le terme ‘omed’ pour désigner ces éléments qui sont à l’origine de l’existence du monde (voir notre commentaire sur la Michna 2).

Le terme‘kayam’(se maintient) que l’on trouve dans la maxime de Rabban Chimon désigne des valeurs plus prosaïques, mais tout aussi indispensables à l’équilibre du monde.

Ces valeurs permettent au monde de se maintenir et de perdurer.

Pouvoir incontournable

Mais il ne faut en aucun cas penser que les éléments cités par Simon le juste (Thora, service divin et bienfaisance) n’ont été nécessaires que pour la création du monde et n’interviennent plus pour son existence chaque jour.

L’auteur du Tossafoth Yom Tov explique que ces éléments ayant été nécessaires pour la création du monde, cela signifie qu’ils sont la raison d’être et le but même de cette création. Ils sont donc, à plus forte raison, indispensables à son maintient.

Dans la version courante de la maxime de Rabban Chimon, on trouve le terme‘omed’

comme dans celle de Simon le Juste. Il faut cependant interpréter ce terme de façon différente, et il est évident que Rabban Chimon nous explique que la société humaine sera équilibrée et durable grâce à la vérité, la justice et la paix (Rabbénou Ovadia).

Penchons-nous à présent sur les différentes interprétations des concepts de Rabban Chimon.

Maïmonide d’abord explique la notion de justice (din) comme signifiant un pouvoir qui fait régner la justice et l’équité.

Il poursuit par l’interprétation du concept de émeth qu’il comprend comme signifiant le niveau intellectuel et de réflexion de la société (maaloth si’hilioth).

Quant au concept de chalom(paix), il désigne les vertus de caractère

(maaloth hamidoth)

dont la société doit être imprégnée pour qu’elle se développe de façon saine.

Ces trois notions forment le secret de l’équilibre d’un état et créent en lui une situation idéale.

La justice des patriarches

Rabbénou Yona, tel qu’il est cité par le Tour (‘Hochen Michpath chapitre 1) interprète cette maxime dans le sens suivant :

Les éléments qui apportent équilibre et stabilité dans le monde s’énumèrent comme suit :


1.

Din(la justice) : ce sont les juges

(dayanim) qui règlent les litiges et empêchent que la loi du plus fort ne s’installe au sein de la société.

2.

Emeth(la vérité) : l’état doit être basé sur la vérité car ce qui est basé sur le mensonge ne peut connaître de réussite durable.

3.

Chalom(la paix) : Il s’agit de la stabilité du pouvoir, car la paix

(chalom)

est ici une allusion à ce qui suit plus loin dans la Michna : ‘Prie pour le salut

(chalom)

de ceux qui sont à la tête de l’état, car sans la crainte qu’ils inspirent, les hommes s’entre-dévoreraient » (Avoth 3 - 2). La paix signifie donc la stabilité du pouvoir.

Le Baal Hatourim (Rabbenou Yaacov ben Rabbenou Acher), dans son introduction au ‘Hochen Michpath (qui traite des questions juridiques) insiste sur l’importance qu’accorde la Thora à ce concept de justice (din).

« Nos maîtres ont enseigné : ‘Tout juge qui statue de façon équitable et en parfaite conformité avec la vérité devient l’associé de D.ieu dans la création du monde’.

Ce précepte prend tout son sens à la lumière des paroles de Rabban Chimon car il est évident que la volonté divine était de créer un monde qui puisse perdurer.

Et la maxime de Rabban Chimon laisse clairement entendre que ceux qui introduisent la malhonnêteté et le vol dans notre monde, amènent à sa destruction.

On s’en souvient, la sentence à l’égard de la génération du déluge, qui entraîna la destruction du monde, fut scellée à cause du vol et de la malhonnêteté

(guezel)

des hommes. (Talmud Sanhédrin 108)

Le juge qui s’investit pour que règne la justice et l’équité, est donc, au sens véritable du terme, l’associé de D.ieu puisqu’il crée l’équilibre et le maintient du monde et empêche sa destruction.

On découvrira dans l’Ecriture que cette notion de justice(michpath)

est l’apanage des patriarches, et des grandes figures de notre peuple, et particularise le peuple juif à travers l’histoire. »

Le prix de la paix

Le commentaire du Sforno ajoute un nouvel élément et nous permet de mieux comprendre le lien avec le verset de Zacharie, cité à la fin de cette maxime : ‘Rendez des sentences de vérité et de paix dans vos portes’ (8 ; 16).

Le Sforno explique : « Rabban Chimon nous donne les règles indispensables au maintient des états :

Il faut d’abord la vérité

(émeth), qui permet d’avoir confiance et de se fier à la parole de l’autre.

Il faut ensuite la justice et la paix : ces deux notions font partie des trois mentionnées par Zacharie lorsqu’il parle de l’avenir et du bien-être d’Israël.

Car il y a deux formes de sentences. Les sentences de vérité, qui tranchent selon la justice pure (din), et les sentences de paix qui sont celles qui vont dans le sens du compromis (pechara).

Nos maîtres nous ont enseigné : ‘Quel est le jugement dans lequel se trouve la paix ? C’est le compromis’ (Talmud Sanhédrin 6b).

Par ces mots, nous comprenons l’importance primordiale de la paix pour l’équilibre du monde.

En effet, lorsqu’il s’agit d’un jugement, toute déviation à la vérité pure cause indubitablement un dommage à l’une des parties.

Or, le compromis, qui est forcément un genre de déviation à la vérité pure, est souhaitable, car il entraînera la paix (

chalom

).

On peut ainsi prendre conscience du prix de la paix, à tous les niveaux de la société, dans les relations privées comme dans les affaires d’état.

Chabbath Chalom