Au nom du saint et vénéré Rabbi Haïm Cohen zt’l

1, Rehov Hapisga, Bayit Vegan, Jérusalem Tel : 00 972 2 643 07 20 Fax : 00 972 2 643 07 19

12, rue Notre Dame des Victoires 75002 Paris Tel : 01 42 27 21 11 Fax : 01 42 27 54 91

Email : daat.haim@piximel.com Site : www.daathaim.org

Chabbath Parachat Ki Tetsé

27, 28 août 2004 – 10, 11 éloul 5764

Jérusalem : Paris

Allumage des bougies : 18 h 33 Allumage des bougies : 20 h 25

Sortie de Chabbath : 19 h 45 Sortie de Chabbath : 21 h 32

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le dvar Thora de cette semaine sur les Pirké Avoth,

« Maximes des pères » consacré à la mémoire de :

Madame Mercedes bat Réna AMSELLEM

  • Nous tenions également à vous annoncer qu’avec l’aide de D.ieu, nous avons emménagé dans de nouveaux locaux, pouvant accueillir dans de bonnes conditions tous nos élèves, y compris ceux de la nouvelle promotion.

  • Ces nouveaux locaux sont situés face au Mont Herzl à l’entrée de Bayit Vegan, 1, Rehov Hapisga, à Jérusalem (bâtiment Yad Harav Herzog où depuis 40 ans se succèdent les prestigieux commentateurs et chercheurs des 28 tomes de l'Encyclopédie Talmudique et de divers commentaires du Talmud)

  • La nouvelle promotion qui commence son cycle d’étude à la Yéchiva, est composée de 38 étudiants très motivés et d’un excellent niveau qui promettent de devenir de brillants dirigeants pour le judaïsme et la Thora ; cette promotion rejoint une centaine d'étudiants qui poursuit son cursus dans les niveaux supérieurs.

Nous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et le Chalom.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat Ki Tetsé

27, 28 août 2004 – 10, 11 éloul 5764

Pureté du silence

Par Rav Eliahou Elkaïm

Comme vertu absolue, dépassant toutes les autres, le silence a été choisi par le Maître qui a émis la maxime que nous allons étudier cette semaine. Pourquoi ?

« Son fils, Chimon, disait : ‘Toute ma vie, j’ai grandi parmi les Sages et je n’ai rien trouvé de meilleur pour le corps que le silence ; l’étude n’est pas l’essentiel, c’est l’action ; celui qui parle trop occasionne des pêchés.’ »

(Chapitre I, Michna 17)

La première remarque que suscite cette Michna, est que son auteur y est simplement mentionné par son nom alors que tous les descendants de la dynastie de Hillel portent le titre de Rabban (cf. Dvar Thora précédent)

De nombreux commentateurs (Rabbénou Yts’haq, Mahzor Vitri…) expliquent que Rabban Chimon a émis cette maxime dans sa jeunesse, avant de prendre les fonctions de Nassi. Cette maxime s’était donc déjà diffusée dans le public au nom de Chimon tout court.

Par la suite, le compilateur de la Michna n’a pas voulu changer la forme sous laquelle elle était déjà connue.

On retrouve le même cas dans le Talmud (Sanhédrin 41a) au sujet de Rabban Yo’hanan ben Zaccaï. Ce dernier est mentionné dans un passage sous le nom de ben Zaccaï tout court. Et le Talmud d’expliquer que c’est avant sa prise de fonction que les faits le concernant eurent lieu et furent publiés.

D’autres commentateurs émettent une objection, en se référant aux mots mêmes de la maxime : ‘toute ma vie’, qui laissent entendre que Rabban Chimon avait un âge avancé au moment où il émit cette maxime.

Le Rachbats (cité par le Midrach Chmouel) révèle quelques éléments historiques qui vont répondre à la question.

Le silence est d’or

Rabban Gamliel exerça la fonction de Nassi pendant près de quarante ans, et son fils, Rabban Chimon ben Gamliel, était déjà âgé lorsqu’il prit sa succession à ce poste.

Il pouvait donc avoir atteint un âge honorable au moment où il écrivit cette maxime, sans pour autant être investi du titre de Nassi.

A partir du moment où il fut nommé, il exerça ces fonctions durant dix-huit ans (de 3810 à 3828). Il sera, comme nous l’avons vu dans le Dvar Thora précédent, avec Rabbi Ychmaël Cohen Gadol, le premier des dix justes (assara harougué mal’houth) exécutés par Rome le 25 sivan 3828, moins de deux mois avant la destruction du deuxième Temple.

Quel est le sens de cette introduction étonnante : ‘toute ma vie, j’ai grandi parmi les Sages’ ?

Rabbi ‘Haïm de Volozhine voit dans les mots de Rabban Chimon l’expression d’une humilité sans pareille.

Le terme ‘gadalti’ (j’ai grandi) signifie que Rabbi Chimon, bien que parvenu au sommet du savoir, considérait que c’était les autres qui l’aidaient à grandir et à s’épanouir, tout comme un jeune enfant qui grandit chez ses parents.

D’après Rabbénou Yona, les mots d’introduction (‘Toute ma vie, j’ai grandi parmi les Sages’) donnent tout son poids au principe que Rabban Chimon va développer dans sa maxime.

Car c’est seulement avoir eu accès à toutes les vertus et qualités du caractère, que possèdent le Sages, qu’il peut affirmer, sans hésiter, que le silence est une vertu qui dépasse toutes les autres.

Rabbénou Bahya développe un commentaire sur la maxime elle-même :

« Il est étonnant de constater que ce grand maître loue le silence, sans en préciser la nature.

Pourtant, celui qui évite toute parole, y compris celle de Thora, cause une nuisance son corps et à son âme.

Il en va de même pour celui qui garde le silence alors qu’il doit régler des problèmes de vie quotidienne. Car il en viendra finalement à manquer du minimum vital et ne pourra plus se consacrer à l’étude de la Thora et à l’accomplissement des mitsvoth.

Il semble donc évident que cette maxime concerne seulement les paroles de médisance (lachon hara) et les autres formes de paroles interdites.

Conversation insignifiante

Ce n’est pas un hasard si la forme employée est « je n’ai rien trouvé de meilleur pour le corps que le silence ».

Car pourquoi ne pas dire simplement: «je n’ai rien trouvé de meilleur pour l’homme »?

C’est que, tôt ou tard, la médisance amène sur l’homme un châtiment physique. Nous voyons cette idée clairement exprimée dans la Thora lors de l’épisode des explorateurs (méraglim) et lors de la faute d’Aaron et de Myriam (Nombres 12). »

Mais il y a une deuxième approche pour expliquer cette maxime, celle développée par Maïmonide et Rabbénou Yona.

Maïmonide s’étend beaucoup sur cette Michna, chose peu courante dans son commentaire. Il analyse d’abord les différentes utilisations de la parole, les classant en cinq catégories :

1- La parole en tant que mitsva

2- Celle qui est interdite

3- Celle qui doit être évitée

4- Celle qui est très appréciable

5- Celle qui est seulement tolérée

La parole ‘mitsva’ est évidemment celle de la lecture des passages de Thora, leur interprétation et approfondissement (Deutéronome 6 ; 7). Cette parole concerne également les prières, les paroles de consolation et celles d’encouragement.

La deuxième catégorie concerne les faux témoignages, les mensonges, la médisance, les mots grossiers et les faux serments.

La troisième contient tous les bavardages inutiles, ceux qui n’apportent rien ni au corps, ni à l’esprit. Ils sont formés des récits d’événements, de l’établissement de cause à effet entre eux, de on-dit, de sentiments déplacés sur des attitudes à bannir et que l’on jugerait avec bienveillance, ou à l’inverse de critiques sur des attitudes louables.

Cette catégorie de parole est qualifiée par nos maîtres de ‘conversation insignifiante’ (si’ha bétéla).

Il est dit de Rav, l’élève de Rabbi ‘Hiya, qu’il n’a jamais tenu de conversations insignifiantes tout au long de sa vie.

La quatrième est celle qui loue les vraies vertus et la vraie sagesse, et qui, à l’inverse, fustige les dévoiements et les inconduites morales.

Cette quatrième forme de parole, qui peut s’exprimer de façon littéraire ou allégorique, peut avoir comme fonction d’amener l’autre à adhérer à de vraies valeurs, ou à s’encourager soi-même à progresser.

Une deuxième bouche

La cinquième et dernière catégorie concerne toutes les paroles de la vie quotidienne, utile au bon fonctionnement dans les domaines professionnels ou technique de la vie.

Cette dernière catégorie n’est ni louée, ni critiquée : elle est permise dans la mesure où elle est nécessaire.

Selon Maïmonide, c’est justement cette forme de parole qui fait principalement l’objet du propos de Rabban Chimon.

Car pour ce qui est des deux paroles positives (celle qui est une mitsva et celle qui est appréciable), il est évident qu’elles ne sont pas concernées par cette maxime.

Les deux catégories de paroles négatives (interdites ou que l’on doit éviter), sont à bannir et il n’est pas besoin d’un conseil pour le comprendre.

La force de la maxime de Rabban Chimon est justement de nous apprendre que plus on réduit la cinquième catégorie, les paroles utilitaires, et plus on s’élève spirituellement.

L’expression ‘pour le corps’ prend tout son sens : pour tout ce qui concerne les besoins matériels, les besoins du corps, le silence est garant d’une progression morale.

Rabbénou Yona complète ce commentaire par un texte du Talmud de Jérusalem.

Rabbi Chimon ben Lakich dit : “Si j’avais été présent à la révélation au Mont Sinaï, j’aurai demandé à ce qu’on me crée une deuxième bouche. »

Ce qui signifie qu’il ne voulait pas utiliser la bouche consacrée aux paroles de Thora pour dire des choses futiles de la vie quotidienne !

Dans le prochain Dvar Thora, nous découvrirons le lien entre le début et la fin de cette maxime…

Chabbath Chalom