Au nom du saint et vénéré Rabbi Haïm Cohen zt’l

1, Rehov Hapisga, Bayit Vegan, Jérusalem Tel : 00 972 2 643 07 20 Fax : 00 972 2 643 07 19

12, rue Notre Dame des Victoires 75002 Paris Tel : 01 42 27 21 11 Fax : 01 42 27 54 91

Email : daat.haim@piximel.com Site : www.daathaim.org

Chabbath Parachat Choftim

20, 21 août 2004 – 3, 4 éloul 5764

Jérusalem : Paris

Allumage des bougies : 18 h 42 Allumage des bougies : 20 h 38

Sortie de Chabbath : 19 h 53 Sortie de Chabbath : 21 h 47

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le dvar Thora de cette semaine sur les Pirké Avoth,

« Maximes des pères » consacré à la mémoire de :

Monsieur Eliahou SEBBAN ben Alia tih'yé

Madame Mercedes bat Réna AMSELLEM

Madame Dona bat Esther BENHAIM

Madame Rahma bat Myriam COHEN

  • Nous tenions également à vous annoncer qu’avec l’aide de D.ieu, nous avons emménagé dans de nouveaux locaux, pouvant accueillir dans de bonnes conditions tous nos élèves, y compris ceux de la nouvelle promotion.

  • Ces nouveaux locaux sont situés face au Mont Herzl à l’entrée de Bayit Vegan, 1, Rehov Hapisga, à Jérusalem (bâtiment Yad Harav Herzog où depuis 40 ans se succèdent les prestigieux commentateurs et chercheurs des 28 tomes de l'Encyclopédie Talmudique et de divers commentaires du Talmud)

  • La nouvelle promotion qui commence son cycle d’étude à la Yéchiva, est composée de 38 étudiants très motivés et d’un excellent niveau qui promettent de devenir de brillants dirigeants pour le judaïsme et la Thora.

Nous comptons sur l’aide de tous nos amis pour pouvoir assumer ce nouveau "challenge" qui permettra à la Yéchiva de poursuivre son essor.

Ici, à Jérusalem, ville éternelle, symbole de la pérennité du peuple juif, nous prions et agissons pour la Délivrance et le Chalom.

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat Choftim

20, 21 août 2004 – 3, 4 éloul 5764

La voie royale

Par le Rav Eliahou Elkaïm

Choisir et suivre une autorité halakhique et se tenir à ce choix est d’une importance capitale. Et celui qui n’agit pas ainsi a peu de chance de parvenir à la vérité…

« Rabban Gamliel disait : Choisis un Rav, éloigne-toi du doute et ne donne pas la dîme approximativement. »

(Chapitre I, Michna 16)

Hillel et Chamaï seront le dernier ‘couple’ de la transmission. Après eux, un seul grand maître cumulera les fonctions de Nassi et de Av Beth Din.

Rabbi Yaakov Kamenetzki, analyse et commente ce changement structurel :

- Il expose d’abord une hypothèse selon laquelle, très probablement, Hérode aurait lui-même aboli la fonction de Av Beth Din pour limiter l’influence des maîtres de la Thora sur le peuple d’Israël.

- Il fait ensuite un commentaire sur le choix de ceux qui allaient dorénavant porter le flambeau de la Thora.

Au crépuscule de la dynastie des ‘Hasmonéens, C’est Hérode, un non-Juif, ancien esclave, qui prit le pouvoir, se conduisant en véritable tyran, injuste et sanguinaire.

Pour contrebalancer cette dégradation, le peuple juif a ressenti le besoin de voir la transmission de la Thora confiée aux descendants de David, ce qui représentait une attache avec un passé glorieux et un espoir pour des jours meilleurs.

Hillel était un descendant du Roi David, et à partir de lui, c’est une réelle dynastie (cf. Dvar Thora Avoth 27) qui perdura huit générations et qui assura la direction spirituelle du peuple juif.

C’est dans notre Michna citée ci-dessus qu’apparaît pour la première fois le titre de ‘Rabban’ (GAMLIEL).

Maïmonide, dans l’introduction de son commentaire sur la Michna, nous révèle la raison de ce nouveau titre, qui vient marquer un décalage entre la génération de Hillel et Chamaï et les générations suivantes.

Prestigieuse descendance

Jusqu’à la génération de Hillel et Chamaï, les grands maîtres avaient une telle stature qu’on ne pouvait la décrire par un titre : on les appelait donc seulement par leur nom.

Les Maîtres des générations suivantes n’avaient plus ce niveau : c’est ce que nos maîtres expriment par le concept de Yéridath hadoroth (la baisse de niveau d’une génération à l’autre).

Pour marquer cette différence, on leur attribua, après Hillel, le titre de Rabban.

Ce titre n’était cependant donné qu’au Prince (Nassi) et au dirigeant spirituel de la génération.

Quand on connaît le niveau moral et le haut degré de connaissance des Maîtres contemporains, on a peine à imaginer à quelles hauteurs devaient se trouver les maîtres du temps de la Michna !

Le titre de ‘Rabban’ ne sera pas utilisé très longtemps car le dernier Rabban sera le fils de Rabbi Yéhouda Hanassi (chapitre 2, Michna 2), huit générations plus tard.

Par la suite, ce seront les titres de Rabbi (en Israël) et de Rav (en Babylonie) qui seront attribués à tous les maîtres de la Michna de l’époque.

Nombre de commentateurs remarquent que notre Michna ne précise pas, comme ce fut le cas jusque-là, que l’auteur de la maxime reçut la Thora de son prédécesseur.

C’est parce qu’à partir de Hillel et pendant les huit générations suivantes, la Thora, comme nous l’avons vu, sera transmise directement de père en fils.

Jusque-là, la transmission de la Thora s’était faite de maître à élève.

Fait étonnant, le livre des Maximes des Pères suit à partir de notre Michna la descendance de père en fils, considérant cette transmission filiale assez importante pour ne pas mentionner à sa place réelle Rabban Yohanan ben Zaccaï, qui sera le dirigeant spirituel du peuple juif pendant la période noire de la destruction du Temple.

Ce dernier ne faisait pas partie de la dynastie des descendants de Hillel mais il fut l’un des plus jeunes élèves du grand maître et il reçut toute la Thora de lui (cf. Maïmonide), assumant la fonction de Nassi ( Prince ) entre deux descendants d’Hillel, plus exactement après le quatrième descendant.

Il fut le seul à porter le titre de Rabban alors qu’il ne faisait pas partie de la filiation.

La Michna, plutôt que de citer sa maxime en suivant l’ordre chronologique, a préféré le placer après la dynastie de Hillel, dans le chapitre 2, Michna 8.

Pour mieux comprendre cette chronologie, penchons-nous sur cette prestigieuse descendance.

Inégalables

Hillel vécut cent vingt ans et son fils Chimon était très âgé lorsqu’il prit sa succession en tant que directeur spirituel du peuple juif.

Vu son âge avancé, il ne tint ses fonctions qu’une très courte période et il est à supposer qu’il ne laissa pas de maxime particulière car il n’est pas cité dans les Pirké Avoth.

D’après Maïmonide, le fils de Chimon, Rabban Gamliel, l’auteur de notre Michna, reçut la Thora dans son intégralité de son père qui l’avait lui-même reçut de Hillel.

Rabban Gamliel vécut lui aussi de longues années et mourut en 3810, quarante-deux ans seulement après Hillel, ce qui lui permit, sans aucun doute, d’être également l’élève de son illustre grand-père.

Son fils, Rabban Chimon ben Gamliel, prit sa succession et c’est lui que nous retrouverons dans la prochaine Michna.

Il fut l’un des dix Maîtres (assara harougué malhout) exécutés par Rome, parmi lesquels figure Rabbi Akiba. Ces dix justes, parmi les plus grands de toutes les générations, furent choisis pour réparer la faute de la vente de Joseph par ses frères (cf. Dvar Thora année 5763, parachat Vayigach).

Pendant la terrible période de la destruction du Temple, c’est Rabban Yohanan Ben Zaccaï qui, comme on l’a vu, reprendra la succession bien qu’il ne fasse pas partie de la dynastie de Hillel.

Mais son successeur, Rabban Gamliel de Yavné reprend la chaîne filiale dans la mesure où il est le petit-fils du premier Rabban Gamliel.

Son petit-fils sera le fameux Rabbi Yéhouda Hanassi, auteur et compilateur de la Michna, dont on trouvera la maxime dans la première Michna du chapitre 2.

Pour revenir à notre maxime, la voix céleste, dont nous avons longuement parlé dans une série de Dvar Thora (Avoth 28 ; 29 ; 30 ; 31), ne s’était pas encore exprimée à l’époque de Rabban Gamliel et n’avait donc pas fixé la loi (halaha) selon les décisions de Hillel.

D’après le Sforno, c’est justement à cette situation que se réfère la Maxime de Rabban Gamliel.

Situations inextricables

C’est l’idée que le Talmud exprime dans le traité de Erouvin et que Rabban Gamliel résume en quelques mots :

« Avant que la loi (halaha) ne soit fixée comme l’école de Hillel, chacun pouvait décider seul s’il voulait suivre l’avis de Chamaï ou celui de Hillel, puisque les deux étaient vrais, selon le principe de élou veélou divré Elokim ‘Haïm. (Celle-ci et Celle-ci sont des paroles du D… de la vie)

Mais il fallait être cohérent et se tenir à son choix, car celui qui changeait de références et de guide selon ses humeurs ou selon la situation pouvait être défini par les mots de l’Ecclésiaste :

« Le sot chemine dans les ténèbres » (2 ; 14) »

(Talmud Erouvin 6b)

Cela est évidemment vrai dans le cas de celui qui cherche toujours à suivre l’avis le plus facile mais même celui qui a de bonnes intentions et qui choisit de suivre toujours l’avis le plus rigoureux (houmra) risque de tomber dans des situations inextricables.

D’après le Sforno, c’est le sens de l’appel de Rabban Gamliel : « Choisis un Rav et tu éviteras ainsi d’être sans cesse à la merci du doute ».

On s’en souvient, dans sa maxime, José ben Perahia (Michna 6) employait la même formule : « Assé leha rav » : littéralement, ‘fais-toi un maître’.

Ce dernier s’adressait à l’élève qui s’engage dans l’étude de la Thora auquel il déconseillait d’étudier en autodidacte.

Il est indispensable de recevoir d’un Rav les méthodes d’analyses de la Thora.

Raban Gamliel utilise les mêmes mots, mais dans un sens différent, et cela selon tous les avis, comme celui du Sforno que nous venons de citer.

Maïmonide, pour sa part, interprète avec une légère nuance les mots de Rabban Gamliel :

Pour Maïmonide, Rabban Gamliel s’adresse à celui qui a des questions de halaha.

Même s’il parvient à analyser les différents aspects du problème, il est indispensable d’avoir une autorité qui puisse trancher et à laquelle il pourra se fier totalement.

C’est seulement ainsi que dans les cas qui ne sont pas explicités de façon claire dans les textes de halaha, chacun pourra sortir définitivement du doute.

Une fin inattendue

D’autres commentateurs comme Rabbénou Yona et Rabbénou Ovadia, voient dans cette maxime un appel aux décisionnaires eux-mêmes :

« N’ayez jamais crainte de demander un conseil ou un avis à un autre Rav, même si ce dernier est plus débutant et que son niveau est inférieur au vôtre.

"Si vous avez le moindre doute et que vous n’êtes pas à même de trancher, vous ne pouvez ni interdire, ni permettre, car cela peut être dans les deux sens une erreur qui pourra nuire à quelqu’un ; et la Thora nous engage à éviter de causer un dommage matériel à un l'autre.

"Il faut donc chercher tous les moyens pour sortir du doute et trouver la véritable solution, quitte à la chercher chez un maître plus jeune et moins expérimenté. »

La fin de notre maxime trouve désormais son sens :

« Ne donne pas la dîme approximativement » est a priori une loi (halaha) qui n’a pas sa place dans le traité de Avoth, qui concerne le comportement et l’aspect universel de la Thora.

Ce conseil est d’autant plus surprenant que Rabban Gamliel emploie une formulation étonnante : « al tarbé » : ne prend pas l’habitude (de donner la dîme…).

S’il s’agissait d’une halaha, on ne parlerait pas « d’habitude ». Soit on peut donner approximativement, soit on ne peut pas, mais on ne peut dire : « Fais-le, mais n’en prend pas l’habitude ! »

L’auteur du Tiféreth Israël comprend ces mots de façon allégorique, illustrant ce qui précède.

Il faut donc comprendre : « N’agis pas à l’image de celui qui donne la dîme approximativement. »

Et l’exemple choisi par Rabban Gamliel est particulièrement parlant : en effet, la dîme (maasser) est le prélèvement de 10% de la récolte, dans le but de le donner aux Lévi, comme nous l’ordonne la Thora.

Sans ce prélèvement, la récolte n’est pas permise à la consommation, dans la même mesure que les aliments interdits.

Si une personne, par ignorance ou par désir de trop bien faire, prélève 12 % par exemple, sa récolte est certes consommable, mais les 2% qui ont été prélevés en trop, ne font plus partie de la récolte, ayant été considérés comme un prélèvement, et ne peuvent pas non plus être considérés comme la dîme (maasser) car elle ne concerne que 10%, et pas plus. Ces 2% restent donc interdits à la consommation.

Dans les 12% prélevés, il y a donc 2% qui sont tével (récolte avant prélèvement)

En les donnant au Lévi, l’homme qui a ainsi agit, fait commettre une faute à ce dernier, qui ignore que cette dîme est interdite à la consommation.

On le voit, on ne peut agir approximativement, même par volonté de bien faire, et même de mieux faire !

Il faut donc toujours chercher à sortir du doute, en choisissant un guide que l’on suivra dans toutes ses décisions.

En choisissant une fois pour toute un Maître, et en se tenant à ce choix, sans osciller d’une autorité à l’autre, on pourra, avec l’aide de D.ieu, rester dans le bon chemin, la voie royale, qui mène les justes au sommet de l’existence.

Chabbath Chalom