Au nom du saint et vénéré Rabbi Haïm Cohen zt’l

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Chabbath Parachat ‘Houkat

25, 26 juin 2004 – 6, 7 Tamouz 5764

Jérusalem : Paris

Allumage des bougies : 19 h 13 Allumage des bougies : 21 h 35

Sortie de Chabbath : 20 h 30 Sortie de Chabbath : 23 h 01

Très chers amis,

J’ai le plaisir de vous adresser le dvar Thora de cette semaine que nous consacrons aux familles de :

- Monsieur et Madame Richard COHEN pour la naissance de leur fils ;

- Monsieur et Madame Yoan SEBAG pour la naissance de leur fils

Elie Nahman Chalom.

Cette semaine, nous poursuivons notre cycle de réflexion sur les Pirké Avoth, « Maximes des pères ».

Avec notre plus cordial Chabbath Chalom,

Rav Chalom Bettan


Chabbath Parachat ‘Houkat

25, 26 juin 2004 – 6, 7 Tamouz 5764

Contradictoire… mais vrai !

(quatrième partie)

Par Rav Eliahou Elkaïm

Poursuivant notre réflexion, nous allons découvrir un nouvel élément, capital à la compréhension de la loi orale : deux opinions opposées, si elles se basent sur les règles de la Thora et si leurs auteurs ne recherchent que la pensée divine, s’étant débarrasser de tout intérêt personnel, ces opinions-là forment pour toujours les différentes facettes d’une même vérité.

« Hillel et Chamaï reçurent d’eux la tradition. Hillel disait : ‘Soyez les disciples d’Aaron, qui aimait la paix et la recherchait sans cesse, qui aimait les hommes et les amenait à l’étude de la Loi.’ »

(Chapitre 1, Michna 12)

Nous poursuivons cette semaine le développement de Rabbi Israël Salanter sur cette notion fondamentale de la loi orale.

Il cite Chmouel (Talmud Yébamoth 13) qui affirme que l’école de Chamaï a concrétisé leur opinion selon laquelle la mitsva

du lévirat s’applique même dans le cas particulier, que nous avons explicité la semaine dernière :

cette mitsva

du lévirat consiste, rappelons-le, pour un homme ayant perdu un frère qui ne laisse pas d’enfant, d’épouser sa veuve.

Le premier fils qui naîtra de cette union sera considéré comme le véritable héritier du défunt.

Si le défunt avait une femme qui était n’avait pas le droit d’épouser son frère pour des raison légales (problèmes d’union interdite :

arayoth), la mitsva

du lévirat ne s’applique pas.

Dans le cas où le défunt avait deux femmes, dont l’une n’a pas le droit d’épouser le frère, et une autre qui en a le droit, Chamaï considère que c’est une mitsva

d’épouser la femme qui ne lui ait pas interdite.

D’après Hillel cependant, la mitsva

du Lévirat ne s’applique ni pour l’une ni pour l’autre, et épouser cette femme devient catégoriquement une faute du domaine des unions interdites (arayoth).

Le même acte est donc l’accomplissement d’une mitsva

d’après Chamaï alors que d’après Hillel, c’est une faute qui rend les deux conjoints passibles de la peine de retranchement (karet) et les enfants qui seront issus de cette union auront le statut de mamzer.

Et Rabbi Israël Salanter de poursuivre en disant que rétrospectivement, on ne considèrera pas que ces mariages (s’ils ont déjà été célébrés) sont une faute, après même que la loi ait été entérinée selon l’avis de Hillel.

Au contraire, ce fut et cela restera pour toujours l’accomplissement d’une mitsva

et celui de la volonté divine.

Au crible de l’intelligence

En effet, jusqu’au moment où la loi (halacha) est fixée, il est du devoir de chaque maître d’agir selon l’opinion qu’il s’est faite sur un sujet.

En revanche, une fois que la loi a été fixée, on ne peut plus agir ainsi, et une personne qui irait contre cette loi commettrait une faute grave, passible de la peine de retranchement (karet). La même action, peut donc être l’accomplissement de la volonté divine ou sa profanation.

Cette situation est due au fait que les discussions entre Hillel et Chamaï s’inscrivent dans le cadre de ‘Celle-ci et celle-ci sont des paroles du D.ieu vivant ».

Mais il nous faut préciser que toutes les discussions entre les maîtres n’entrent pas automatiquement dans ce cadre.

Nous citerons ici une petite partie d’un deuxième texte de Rabbi Israël Salanter sur ce sujet (Or Israël chap. 30, première remarque), où il précise les conditions requises pour que des discussions entrent dans ce cadre :

« De par sa nature même, un homme réfléchit et décide, sous l’effet de nombreux paramètres et non sous celui de son intellect pur.

A la différence des anges et des autres êtres célestes, exclusivement formés d’esprit pur, chaque homme est doté d’une âme, dont les composantes influent sur sa façon de penser.

Dans ce que l’on appelle les forces de l’âme (ko’hot hanefech), il faut tenter de discerner celles qui sont innées, indissociables de son intellect, et les autres, qui viennent fausser son jugement (néguiat hadaath), et dont il peut enrayer l’influence par un effort sur lui-même.

C’est justement le travail d’un grand maître ou d’un décisionnaire.

Depuis la révélation sinaïtique, tout ce qui n’est pas transmis sans équivoque dans le texte ou la loi orale doit être passé au crible de l’intelligence des hommes, suivant les règles d’interprétations transmises avec la Thora. C’est ainsi que les maîtres découvrent la volonté divine concernant les sujets qui se présentent à eux.

La démonstration doit évidemment être basée sur les textes de la Thora et s’appuyer sur un raisonnement logique. »

La vérité, si difficile à atteindre

Dans le cas des nombreuses discussions entre Hillel et Chamaï, chacun d’entre eux apporte des arguments irréfutables, basés sur les règles que nous venons de définir.

La question se pose de savoir comment trancher dans des cas où les avis sont contradictoires.

De façon générale, la règle fondamentale est d’aller d’après la majorité des maîtres de l’époque. C’est ce que la Thora elle-même a fixé (Exode 23 ; 2).

La situation entre Hillel et Chamaï, où les deux grands maîtres de l’époque avaient des avis opposés, sans que puisse se distinguer une majorité, a causé une polémique pendant trois ans, divisant le peuple juif… jusqu’à ce que la voix céleste s’exprime.

On ne pouvait pas non plus les départager au juger de leurs raisonnements respectifs, car Hillel amenait plus de preuves que son contradicteur, mais la profondeur de raisonnement de Chamaï dépassait celle de son antagoniste.

Pour sortir de l’impasse, seule la voix céleste pouvait trancher.

Après toute cette polémique, ajoute rabbi Israël, le peuple juif aurait pu penser que Chamaï qui, avant l’intervention de la voix céleste, ne reconnaissait pas la préséance des opinions de Hillel (malgré le nombre de preuves), agissait sous l’emprise d’un problème de caractère, n’étant pas prêt à s’incliner devant un avis contraire, ni à changer son approche.

Cela aurait été une grave erreur, contre laquelle la voix céleste a ajouté le concept de ‘Celle-ci et celle-ci sont des paroles du D.ieu vivant ».

Cette déclaration nous dévoile deux éléments fondamentaux :

- Le premier concerne Chamaï, dont ont comprend alors que le seul et unique but était de découvrir la vérité, sans qu’aucune considération personnelle, consciente ou inconsciente, aucun intérêt propre, aucun problème de caractère ne vienne perturber le raisonnement. C’est ce que l’on appelle une recherche ‘lichma’ (exclusivement dans le but de percer les vérités divines).

- Le deuxième élément est une conséquence du premier, et se place au niveau absolu des choses : même si l’avis de Chamaï n’a pas été retenu comme loi (halaha), il n’en reste pas moins un élément intrinsèque de la Thora elle-même.

Et dans cette optique, dans la mesure où les paroles de Chamaï sont ‘une parole du D.ieu vivant’, approfondir et étudier ses avis reste partie intégrante de la mitsva

d’étude de la Thora, étant l’une des facettes de la loi orale pour toujours.

Le fait que les deux grands maîtres cherchaient uniquement la vérité divine (lichma), ayant parfaitement accompli le travail qui consiste à discerner les forces innées venant de l’intellect et les autres, qui faussent le jugement (comme le décrit Rabbi Israël Salanter), contrôlant parfaitement leur caractère, place leur opposition (mahloket) au dessus de toutes les autres, comme le souligne la Michna de Pirké Avoth (5 ; 17).

Par le fait qu’ils aient atteint le niveau lichma, les thèses de Hillel et de Chamaï sont une partie intrinsèque de la Thora.

Dans le Dvar Thora de la semaine prochaine, nous conclurons le sujet en découvrant ce que le Zohar nous dévoile sur les racines différentes des âmes de Hillel et de Chamaï.

Chabbath Chalom